Il pleut ce dimanche 12 novembre devant la Praille, avant le match du Servette FC contre le FC Bâle. Pourtant, quand l’on s’approche d’un supporter pour évoquer la carrière de Tibert Pont, la pluie se fait vite oublier.

David, fervent supporter du Servette FC, ne tarit pas d’éloges sur l’homme qu’il nomme “Le Capitaine”. « C’est une légende du club, il a fait toute sa carrière au Servette FC. C’est un clubiste qui mouillait toujours le maillot pour l’équipe. Je me souviens d’un match, ici à la Praille, où il avait marqué un doublé incroyable ! Il faudrait plus de joueurs comme lui ! ».

Tibert Pont, capitaine emblématique du Servette FC après pas moins de quatorze saisons jouées avec le club garde une place centrale dans le cœur des Genevois. Le fils de Michel, adjoint de la Nati sous Köbi Kuhn et Ottmar Hitzfeld, connaîtra de grandes joies sous le maillot grenat comme la montée en Super League en 2011, mais également des moments difficiles avec deux faillites administratives (2005 et 2015) et une relégation en Challenge League (2013). Néanmoins, le Genevois est resté auprès des siens et a aidé à la (re)construction d’un Servette aujourd’hui solide.   

« La sociologie m’a aidé dans le football »

Né à Genève le 23 janvier 1984, Tibert fait ses premières passes au Grand-Lancy avant d’entrer dans l’académie du Servette. Il est propulsé en première division, en 2004, à seulement 19 ans contre le FC Xamax. Devant 10’000 spectateurs, le milieu défensif fait ses débuts avec les Grenat. Le début d’une longue histoire…

Tout juste sorti de l’adolescence, ses premiers pas avec la première équipe sont remplis de défis. Il arrive cependant à se faire une place au sein de la “Dream Team” du Servette. En effet, Tibert débute sa carrière avec des joueurs qu’il regardait enfant à la télévision, comme le champion du monde français Christian Karembeu. A l’aube de ses quarante ans, Tibert Pont revient sur ses moments clés vécus avec le Servette FC. « Je me rappelle d’un conseil qu’Alexandre Comisetti m’avait donné lorsque je débutais. Il m’a dit : “avant de demander la balle, regarde autour de toi et ensuite joue vite” ! Le football avait évolué et il fallait aller très vite avec la balle ».

© Eric Lafargue (source : super-servette.ch)

Les conseils et inspirations de ces joueurs ont accompagné le Genevois tout au long de sa carrière. Et ils lui ont été utiles lors des passages à vide du club, particulièrement en 2005 lors de la faillite du club sous l’ère Marc Roger. Un bon nombre de joueurs quittent alors le navire pour rejoindre d’autres équipes. Tibert, quant à lui, garde son sang-froid et reste au Servette FC car le projet sportif de l’équipe le motive. Il exprime également sa volonté, à l’époque, de ne pas s’éloigner de sa famille et de ses amis. Il en profite pour reprendre ses études en Sociologie à l’université de Genève.

« Ce n’était pas facile de concilier les études et le football ! J’allais aux cours après les entraînements, mais j’ai manqué pas mal de cours. Heureusement que mes potes me donnaient parfois leurs notes. La première année, je l’ai réussie de justesse ! Mais je ne regrette pas, la sociologie ça m’a aidé dans le monde du football mais également pour après ». Sur le terrain, Tibert brille avec le Servette. Il sera le meilleur buteur au poste de milieu de terrain en Première Ligue. 

Un ami nommé Vitki

C’est en Première Ligue qu’il rencontre également son meilleur ami, Matías Vitkieviez. Ils s’opposent d’abord durant un derby genevois, Matías jouant avec le FC Etoile Carouge. Mais ce dernier le rejoindra l’année suivante au sein du Servette FC en Challenge League. L’attaquant désormais Servettien se rappelle de sa première impression de son coéquipier. « Il était très professionnel, sérieux ! Il n’était pas pour rien capitaine! On a également eu un très bon feeling, c’est un mec qui aime rigoler ».

Ensemble ils vivront aussi le plus beau souvenir de leur carrière, la montée en Super League en 2011 avec Joao Alves comme entraîneur. Matías évoque un match important durant cette saison où Tibert Pont s’est montré décisif. Il marque contre Vaduz à la 90e minute, renversant le match pour le Servette FC. Cette victoire permettra aux Servettiens de jouer les barrages contre Bellinzone et retrouver ensuite la Super League après la victoire devant 23’000 spectateurs. 

© Servette FC

Les deux joueurs vont jouer dix ans ensemble et partager plus que l’amour du ballon. Ils voyageront en Amérique du Sud, où Tibert sera le témoin de mariage de Matías. Ils se retrouveront en dehors des terrains pour écouter Tibert mixer de la musique latino dans son salon. Ils célébreront dès lors leurs buts par quelques pas de danse inspirés de la culture hispanique. Le départ de Tibert Pont du Servette sera un véritable coup dur pour son coéquipier.

Pour le capitaine, ce sera également difficile de quitter les Grenat après plus de 292 matchs joués sous ce maillot. Il fera une sortie en grandes pompes en marquant lors de son dernier match à la Praille en 2017. Néanmoins, les deux joueurs restent en contact vu qu’ils ont tous les deux misés sur le même projet d’après-foot avec Le Village du Soir. Placé à côté du stade, les deux anciens joueurs ont décidé d’investir en 2015 dans ce projet culturel. 

Aujourd’hui, Tibert Pont est directeur de ce qui est devenu le plus grand lieu culturel festif de Suisse romande. Il organise entre autre de grands événements à thème, notamment le Pueblo Festival dédié à la culture latino-américaine ou le Villaggio Azzurro qui réunit la communauté italienne tous les étés. Passionné de musique, il mixe également sa musique favorite lors de certains événements. L’ancien Servettien reste encore impliqué pour son club de coeur. Il commente parfois certains matchs avec son compère Matías et admire le parcours de la première équipe, qui propose un beau jeu dans la coupe européenne. Il dit d’ailleurs que les Grenat vivent une période dorée.

Désormais il partage son expérience avec les jeunes Servettiens et leur conseille de « croire en soi, être sérieux et surtout rester au Servette (rires). Non mais percez au sein de la première équipe, faites vos armes ici, puis ensuite pourquoi pas aller ailleurs… ».

Quant à nous, nous le remercions pour son parcours hors du commun au Servette et lui souhaitons autant de succès dans ses nouveaux projets !