Qui est pour vous le meilleur joueur suisse de tous les temps ? Les plus vieux répondront Stéphane Chapuisat, les plus jeunes citeront Xherdan Shaqiri, mais Alexander Frei fait incontestablement partie des plus grands joueurs suisse de l’histoire, voire le plus grand. Résumé de la carrière hors-norme de notre cher Alex national.
Débuts juvéniles
Tout a commencé le 15 juillet 1979, dans la ville de Bâle. Bien qu’étant né en Suisse alémanique, le petit Alexander grandit en Romandie. Fan de l’AC Milan des années 80, Frei était admiratif du néerlandais Marco van Basten. À 9 ans, il repart au FC Aesh, à Bâle-Campagne, où il évolue jusqu’à ses 16 ans. Lors de la saison 1994-1995, le jeune Rhénan performe à tel point qu’il se fait remarquer par les recruteurs du néo-promu de Ligue Nationale A, le FC Bâle.
Débuts pro au FC Bâle
Saison 1997/98, le club bâlois décide après une saison moyenne de faire monter deux jeunes du centre de formation en équipe première. Parmi ces deux jeunes, se trouvait Alexander Frei. Le 26 juillet 1997, Alexander Frei fait ses débuts en Ligue Nationale A contre le FC Zürich à la 87’ (0-0). Il va ensuite enchaîner 8 matchs à la suite. Mais suite à de mauvais résultats, l’entraîneur se fait licencier. L’adjoint du précédent ne croit pas en Alex Frei et le relègue sur le banc sur 6 des 8 matchs. La situation empire lorsque le 1er janvier, le nouvel entraîneur Guy Mathez prend les rênes du club. Alex ne va disputer que 16 petites minutes sur 14 matchs.
Bref passage au FC Thoune
Le Suisse doit alors se résigner à quitter le club rhénan libre lors du mercato estival. Il signe alors au FC Thoune pour la saison 1998/1999 en Ligue Nationale B. Ce n’est guère mieux, il ne va jouer que 4 matchs sur l’ensemble de la saison pour quand même 2 buts inscrits.
Emergence à Lucerne
À l’aube des années 2000, Frei, du haut de ses 20 ans, n’a pas encore explosé et ses deux dernières saisons sont plus que moyennes mais l’espoir demeure. Lors de la saison 1999/2000, les dirigeants du FC Lucerne engagent l’Helvète. Titulaire indiscutable, il dispute 32 matchs sur les 36 possibles avec le club. Le Rhénan va planter 13 buts dont une quasi-série où il marque lors de 8 matchs consécutifs. Lors de la saison 2000/2001, le Suisse est en confiance et il commence en trombe. Il marque 5 buts en première moitié de saison avec Lucerne.
Révélation au Servette FC
En janvier 2001, aux abords du Lac de Genève, l’attaquant suisse attire un certain technicien : Lucien Favre, entraîneur du Servette FC. Un échange Alexandre Rey – Alexander Frei s’envisage (niveau administratif ça doit bien arranger aussi il n’y a qu’à changer trois lettres). Malgré les intérêts du leader Lugano et du tenant du titre Saint-Gall, c’est le club genevois qui rafle la mise.
Le bâlois dispute son premier match sous les couleurs grenats le 25 février 2001 contre son club formateur. Sans demi-mesure, il marque et délivre une passe décisive. Servette bat le FC Bâle 3-0.
Le score fait très vite le tour de la presse suisse, et la nouvelle recrue genevoise est vue comme l’homme du match. Le buteur servettien récidive de 5 autres buts le reste de la saison dont un magnifique doublé lors du derby contre le Lausanne-Sport. En Coupe, il marque en demi-finale le seul but de la rencontre contre Saint-Gall et il clôture la marque en finale contre Yverdon-Sport (3-0) gagnant ainsi le premier titre de sa jeune carrière.
En sélection, l’attaquant servettien impressionne le sélectionneur suisse de l’époque l’Argentin Enzo Trossero, qui le sélectionne pour les éliminatoires de la Coupe du monde 2002 organisée par le Japon et la Corée du Sud. Le 24 mars 2001, Alexander Frei fait ses premières foulées sous la tunique de la Nati contre la Yougoslavie, le match finira par un match nul 1-1. Quatre jours plus tard, l’attaquant helvète est titulaire contre le Luxembourg et claque un triplé. Cette saison est bien celle de la révélation.
Saison 2001/2002, nouvelle saison mêmes standards, l’attaquant ravi les supporters grenats. Véritable bourreau des formations suisses, Frei plante 18 buts en 33 matchs. Le 13 avril 2002, il inscrit même un quadruplé contre la formation sédunoise. Virtuose.
Cette saison est celle de l’épopée européenne pour Servette déjà racontée dans un article précédent : L’épopée européenne de 2001-2002
Le n°11 servettien clôture son aventure avec le club grenat par un exercice 2002/2003 avec 13 buts en 19 matchs en championnat. Un soir de décembre 2002 contre les Young Boys (4-4), Alexander Frei, à l’âge de 23 ans, dispute son dernier match avec le Servette FC. Ce soir-là, nous avons perdu deux monuments : Alexander Frei et le Stade des Charmilles.
En France: Stade Rennais
En hiver 2003, le club grenat reçoit une offre qu’il ne peut pas refuser : 1,5M € pour l’attaquant rhénan. Les débuts du buteur suisse en Ligue 1 sont plus que mauvais. Sur 15 matchs lors de la saison 2002/2003, il ne marque que deux petits buts. En fin de saison, il sera mis à l’écart par son coach ne croyant plus en lui. Dès novembre 2003, il reprend sa place de titulaire. Frei enchaîne alors les buts dont un mémorable quadruplé contre l’OM de Fabien Barthez qui permet à son équipe de s’imposer 4-3. Il finit l’exercice 2003/2004 avec 20 buts en 28 matchs, second meilleur buteur de Ligue 1 derrière un certain Djibril Cissé.
À l’Euro 2004, Alexander Frei, après un match moyen contre l’Angleterre, est suspendu pour le reste de la compétition suite à un crachat à l’encontre de Steven Gerrard lors du match contre l’Angleterre.
Sa saison 2004/2005, continue sur la lancée de celle d’avant. Alex Frei va planter 20 buts et 2 passes décisives en 36 matchs ce qui va lui permettre cette fois-ci de finir en tête du classement des buteurs de la Ligue 1 et dans l’équipe-type du championnat.
L’histoire Alexander Frei et le Stade Rennais prend fin lors de l’exercice 2005/2006. Une saison en demi-teinte, car malgré un bon début de saison, le buteur helvète va contracter une pubalgie qui va durer toute la seconde partie de saison. Mais l’international suisse se remet sur pied juste avant la Coupe du monde 2006.
Dans le groupe de la France, du Togo et de la Corée du Sud, la Nati va mener un véritable récital, finissant première du groupe avec 2 victoires et un match nul et 2 réalisations de notre Alex national. Malheureusement, même si l’équipe n’a pas concédé de buts de toute la compétition grâce à un Zuberbühler aux mains d’or, la Nati sort en ⅛ de finale aux tirs au but sans en transformer un seul contre l’Ukraine.
En Allemagne: Dortmund
En Allemagne, le Rhénan a tapé dans l’œil et durant le mercato estival, Dortmund sort le chéquier et signe l’Helvète pour 4,1M €. Le Suisse ne va pas décevoir : 17 buts et 6 passes décisives en 34 matchs. Le Bâlois va même claquer un doublé et une passe décisive contre l’ogre bavarois et permettre la victoire 3-2 des siens. Il finit second meilleur buteur de Bundesliga derrière Theofanis Gekas.
Toutefois, la saison 2007/2008 d’Alex Frei va être accompagnée de problèmes à la hanche et une grosse blessure musculaire qui va l’écarter des terrains jusqu’en février 2008. Il va quand même être promu au rang de capitaine pour la fin de saison et en 15 matchs de Bundesliga, il va planter 6 buts et 5 passes décisives.
Tout s’annonçait bien pour l’Euro 2008, le capitaine et l’idole du pays joue à domicile chez lui. Le 7 juin 2008, à Bâle, c’est le match d’ouverture Suisse-République Tchèque. Frei brille, mais ne trouve pas le chemin des filets. À la 42e, Barnetta prolonge pour son capitaine, le ballon lui vient trop en arrière, Grygera lui rentre dedans, le genou tourne. L’attaquant suisse vient de subir un début de rupture du ligament intra articulaire du genou. Il doit sortir. Suite à ça, la Suisse fera un parcours désastreux où la victoire contre le Portugal 2-0 ne sera qu’anecdotique.
Frei revient de blessure en mi-septembre 2008. Un nouveau coach à la tête du Dortmund: Jurgen Klopp. Il revient en bonne forme puisqu’à son retour, lors du Derby de la Ruhr, Alex rentre en jeu à la mi-temps et permet à son équipe de revenir de 3-0 à 3-3 grâce à deux buts et une passe décisive. Lors de cette saison 2008/2009, il va enregistrer 12 buts et 9 passes décisives en 29 matchs. Mais en fin de saison, le joueur âgé de 30 ans cherche désormais un retour à la maison.
Le retour au sources au FC Bâle
Le 18 juillet 2009, le FC Bâle annonce la venue d’Alexander Frei pour la somme de 4,25M€. En championnat, Frei finit l’exercice avec 15 buts et 11 passes décisives en 19 matchs. Il manque une grande partie du second tour à cause d’une fracture au bras. Il revient juste à temps pour la finale de la Coupe de Suisse face au Lausanne-Sport. Victoire 6-0, l’attaquant helvète décroche ainsi son deuxième titre. Et quelques semaines plus tard, il remporte la Super League pour la première fois.
Côté sélection, la Suisse se qualifie pour la Coupe du monde 2010. Absent au premier match, il est présent contre le Chili, comme à l’Euro 2008 contre la République Tchèque, il sort sur blessure à la 42e et son équipe perd 1-0. Il revient contre l’Honduras en rentrant à la 70e, mais n’arrive pas à débloquer le score (0-0).
La perspective de l’année 2010/2011 a l’air bonne. En Super League, il réalise alors sa meilleure saison : 27 buts et 10 passes décisives en 35 matchs. Le club remporte à nouveau le championnat et Frei est élu meilleur joueur de la compétition en plus d’être le meilleur buteur.
Avec la Suisse, Frei voit son rôle petit à petit diminuer sous Ottmar Hitzfeld. Il disputera encore un match de qualifications contre la Bulgarie en mars 2011 avant qu’il ne décide de quitter la sélection suisse à cause des sifflets qu’il reçoit depuis plus d’un an. C’est donc la fin de son aventure helvétique. Frei et la Suisse, c’est fini. Il aura marqué 42 buts et fait 8 passes décisives en 84 matchs ce qui fait de lui le meilleur buteur de l’histoire de la sélection suisse.
Saison 2011/2012, le Bâlois est comme un bon vin : plus il est vieux, plus il est bon. Il marque 33 buts et 14 passes décisives en 44 matchs. En Super League, comme la saison dernière, il finit meilleur buteur et remporte le championnat. En Coupe de Suisse, il remporte aussi le titre en étant décisif à chaque tour (4 buts et 2 passes décisives en 5 matchs).
En Ligue des Champions, Bâle tombe dans le groupe du Manchester United. Lors de la double confrontation, Frei va performer à son plus haut niveau en inscrivant un doublé à Old Trafford alors que Bâle était mené 2-1. Au match retour, Streller et Frei donnent une véritable leçon à la défense Ferdinand-Vidic en inscrivant chacun un but, victoire 2-1. Le FC Bâle se qualifie en ⅛ de finale de la Ligue des Champions avant d’échouer contre le rouleau compresseur bavarois.
Je vous laisse apprécier ce but de Frei à la 83e qui décrit parfaitement son rôle. Un véritable renard des surfaces. Sur le centre de Shaqiri, il est caché derrière Rio Ferdinand. Ce dernier se croyant seul, laisse rebondir le ballon. Grosse erreur, Frei n’attendait que ça et se jette dessus pour crucifier un De Gea impuissant.
La saison 2012/2013 serait la dernière pour Alexander Frei. Du haut de ses 33 ans, il sent son corps faiblir et préfère arrêter au meilleur de sa forme. Son ancien coéquipier Murat Yakin, devenant le nouvel entraîneur, relègue Frei sur le banc petit à petit. En 18 petits matchs de Super League, il marque 7 buts et délivre 4 passes décisives. Le Bâlois enchaîne avec son club son 4e championnat d’affilée. Le 14 avril 2013 marque la fin de la carrière du légendaire Suisse. Contre Lucerne, il clôt son aventure en inscrivant un magnifique coup-franc avant de céder sa place à Marco Streller à la 64e sous une standing ovation.
Alexander Frei, c’est 262 buts et 76 passes décisives en 511 matchs. Alexander Frei, ce sont 4x Super League, 3x Coupe de Suisse, 3x Soulier d’or (2x Suisse, 1x France), élu 3x Meilleur suisse de la saison. Depuis, l’Helvète s’est converti dans une carrière en dehors des terrains. D’abord Directeur sportif à Lucerne, puis entraîneur chez les jeunes de Bâle, il est désormais coach du FC Wil 1900, club de Challenge League.
À l’image de la Suisse, Alexander Frei incarne la simplicité, la justesse, le calme et la rigueur. Il a réussi à re développer l’image du pays à l’international et à inspirer de nombreux jeunes Suisses des années 2000.