Il aura donc fallu que la vieille sauterelle zurichoise tombe en Challenge League pour que nos têtes pensantes se décident à proposer une réforme de notre championnat (traduisez un sauvetage de GC). 12 équipes, des changements qui surprennent mais qui, au vu d’autres championnats européens, n’ont rien de fou. Les génies de Muri ne sont finalement pas si originaux que ça.

Juin 2003. GC fête le 27è titre de champion de son histoire, au terme de la dernière saison de la défunte LNA et de ses terribles et redoutés tour final et tour promotion/relégation. La SFL s’apprête en effet à introduire la Super League pour la saison 2003-2004, qui coïncidera avec la prise de pouvoir du FCB de la belle (ou pas) Gigi Oeri sur le plan national et du FCZ sur le plan local.

70 ans que la SFL n’avait pas eu à envisager la vie sans GC. Pas de retrouvailles tard le soir dans une petite chambre minable de la Langstrasse à l’abri des regards, la séparation n’était voulue par aucune des deux parties, qui vont désormais tout faire pour ne plus jamais avoir à vivre éloignées l’une de l’autre.

21 août 2019. La Super League, orpheline de sa vieille ridée des bords de la Limmat, nous offre une proposition de réforme qu’elle soumettra au vote des membres de son Assemblé Générale (aka les clubs de Super et Challenge League), le 23 novembre:

– Championnat à 12 clubs, premier tour avec 22 matchs

– Tour Final: les 6 premiers s’affrontent en match aller-retour et  commencent avec le nombre de points du premier tour divisés par 2.

– Tour de Classement : les 6 dernières équipes s’affrontent en match aller-retour et commencent avec le nombre de points du premier tour divisés par 2.

– Le vainqueur du tour de classement joue un barrage aller-retour contre le 3è ou 4è du tour final pour une place en qualifications d’Europa League.

– Aucun changement en Challenge League

Une réforme qui, à quelques changements près, n’est pas sans rappeler la LNA. Qu’est-il passé par la tête des gars de Muri  avec cette idée de barrage européen entre le 7è et le 3è ou 4è? Un petit tour d’Europe des pays dont la population est comprise entre 7 et 12 millions d’habitants et vous verrez que, finalement, on n’est pas si originaux que ça. 11 pays que l’on pourrait diviser en 2 catégories : les normaux et les anticonformistes. 

Les 7 normaux

Ils sont naturellement la catégorie la moins intéressante des deux. Championnats en un seul groupe, 2 matchs contre chaque équipe. Ils ne se différencient que par le nombre de clubs engagés.

Hongrie : 12 équipes 33 matchs

Serbie : 16 équipes 30 matchs

Biélorussie : 16 équipes, 30 matchs

Grèce : 16 équipes, 30 matchs

Portugal : 18 équipes, 34 matchs

Suède : 16 équipes, 30 matchs

Azerbaïdjan : 8 équipes, 28 matchs

Seule la Hongrie se distingue avec son championnat de 12 équipes qui s’affrontent chacune 3 fois. Donc le risque de jouer 2 matchs à l’extérieur et 1 seul à domicile contre certains clubs.

Les 4 bâtards

Autriche, Bulgarie, Belgique et République Tchèque se sont, chacun de leur façon, dépassés pour offrir à leurs congénères des formules plus étranges les unes que les autres. Commençons par notre voisin autrichien, dont GC la SFL s’est certainement inspirée. 

Jusqu’à la fin de la saison 2017-2018, la Bundesliga autrichienne se jouait sur le même modèle que notre Super League actuelle : 10 équipes, 36 matchs. Passée à 12 équipes la saison dernière, la seule différence par rapport à notre projet de réforme se situe dans la dernière place qualificative en Europa League. Les deux premiers du tour de relégation s’affrontent dans une demi-finale en un match. Le vainqueur joue ensuite une finale aller-retour contre le cinquième du championnat pour espérer arracher la dernière place européenne. 

La saison passée, après s’être imposé 2-0 en demi-finale contre le SV Mattersburg (8è), le Rapid Vienne (7è) aura perdu en finale contre Sturm Graz, dont le nom évoquera des regrets éternels à beaucoup de supporters Grenats. Nos bourreaux d’août 1999 assurant leur place en Europa League grâce à une victoire 2-1 à Vienne lors de la manche aller, écart que la défaite 1-0 au match retour à Graz ne pourra pas combler. 

Ce système avec une demi-finale offre un avantage au club issu du tour pour le titre. Le Rapid Vienne ayant joué sa demi-finale le 28 mai, la finale aller le 30 et le retour le 2 juin. 3 matchs en 5 jours pour le Rapid contre 2 en 3 jours pour Sturm Graz, avec seulement 48h de récupération entre la demie et la finale, tout cela au terme de la saison. 

Le twist bulgare

Le championnat bulgare, jusqu’au terme de la saison 2014-2015, suivait la tendance de la majorité des championnats : 16 équipes jouant 30 matchs. Surement chauffés à la rakjia, les dirigeants du foot bulgare décidèrent de passer à 14 équipes. 

La première phase voit les clubs s’affronter 2 fois chacun. A l’issue de ces 26 matchs, les 6 premiers s’affrontent dans un tour pour le titre qu’ils commencent avec le total de points acquis lors de la première phase. L’eau-de-vie bien montée à la tête, les pontes du championnat, dans leur folie réformatrice, ont décidé de séparer les 8 clubs allant de la 7è à la 14è place en deux groupes de quatre. Les deux premiers de chaques groupes se qualifient pour les barrages européens, les deux derniers allant quant à eux en barrages contre la relégation. 

Le barrage européen commence par des quart-de-finale, en 2 manches. Les deux vainqueurs s’affrontent ensuite en demi-finale, toujours en deux manches. En finale, le vainqueur affronte le 3è du tour pour le titre. Après avoir éliminé le Lokomotiv Plovdiv en 1/4 puis le Slavia Sofia en 1/2, l’Etar Veliko Tarnovo s’est incliné en finale face au Levski Sofia qui a donc  pu valider son ticket européen. Fête à Sofia, gueule de bois à l’Etar et encore un barrage européen qui suit la logique du championnat. 

La folie tchèque 

Comme chez les autrichiens, le changement est arrivé la saison passée. Finie la První Liga et sa formule de 16 équipes et 30 matchs. Place à la Fortuna Liga, ses 16 équipes et 30 matchs… suivis de leurs 3 poules !

La poule championnat voit les 6 meilleures équipes de la saison régulière s’affronter une fois chacune, en gardant le nombre de points acquis lors de la première phase, pour finir avec un total de 35 matchs.

Les équipes classées de la 11è à la 16è place se rencontrent une fois chacune dans la poule relégation à l’issue de laquelle le dernier est directement relégué, tandis que les 14è et 15è jouent un barrage contre les 2è et 3è de D2. 

Et les équipes classées entre la 7è et la 11è place ? Elles s’affrontent dans les barrages européens sur le même principe que les barrages bulgares, mais avec match aller et retour en finale. Contrairement aux autrichiens et aux bulgares, l’équipe sortant de la poule championnat n’a pu composter son billet européen. Arrivé en finale après quatre matchs de barrages, le Mladá Boleslav a créé la surprise en renversant en finale le Banik Ostrava avec une victoire 1-0 chez les 5è de la poule championnat. Après avoir éliminé les redoutables kazakhs d’Ordabasy au 2è tour qualificatif, les rêves européens du Mladá Boleslav se sont envolés au soir du 15 août face au Steaua Bucarest. Tout ça pour ça. 

La Belgique

La Jupiler Pro League devant faire honneur à la réputation de son peuple, les belges nous ont concocté la formule la plus alambiquée de l’histoire du sport moderne. Là encore, 16 équipes pour 30 matchs, le 16è directement relégué. C’est sur la suite de la compétition que les compatriotes de François Damiens tuent la concurrence : les Play-offs.

Les Play-offs 1 voient les 6 meilleures équipes de la première phase s’affronter deux fois, avec les points acquis divisés par deux. 10 matchs à rajouter aux 30 premiers : seules le Championship, la League One et la League Two (D2, D3, D4 anglaises) jouent plus en Europe, avec 46 matchs pour des championnats de 24 équipes.

Les Play-offs 2 voient les équipes classées de la 7è à la 15è position rejoindre les équipes classées de la 2è à la 4è place de Proximus League (D2) et qui seront séparées en 2 groupes de 6 avec les compteurs points remis à zéro. Les premiers des deux groupes s’affrontent ensuite dans une finale en un seul match, chez l’équipe qui aura accumulé le plus de points lors des Play-offs 2 avant d’affronter, toujours sur un match et à l’extérieur face au 4è des Play-offs 1 pour s’adjuger le dernier strapontin européen. Pas de surprise la saison passée : après être allé gagner à Courtrai, le Sporting Charleroi est allé s’incliner à Anvers, 5è des Play-offs 1.

Au final, la réforme proposée par la SFL n’aura finalement pas grand-chose d’original ni de nouveau. Un sondage sur notre page Facebook indique que, sur environ 500 votes, vous êtes 86% à souhaiter ce passage à 12 clubs. Le Röstigraben ne fera certainement pas effet cette fois-ci, car plus qu’une simple réforme, c’est le sauvetage des horribles sauterelles, élève préféré de la SFL, qui est en jeu.  

Blan Lokal